Bsiré -le-Lièvre et Dami -l’Hyène : l’histoire des courges
(N°11) Cette année-là, le ciel avait fermé ses vannes et la pluie s’était fait rare. La terre avait séché plus d’une fois et s’était fendue. Les marigots avaient fini d’engloutir les quelques gouttes d’eau qui restaient au fond des puits. La nature et la végétation s’étaient fanées et les fleurs avaient aussi séché. La famine s’était invitée chez de la population qui avait croupi et avait soupiré après le bon vieux temps où la nourriture se servait à provision et le reste versé sans même aviser son voisin. Chacun se dérobait et faisait tout son possible dans ces moments peu commodes pour essayer de survivre.
C’est donc pendant ces moments de rare détresse que les deux voisins d’antan se sont entendus pour aller chercher de la nourriture. Bsiré-le-Lièvre et Dami-l’Hyiène avaient donc parcouru tout le pays sans rien trouver. Ils décidèrent d’aller encore plus loin, dans d’autres contrées où la famine ne s’était pas encore entièrement installée. C’était là-bas où finalement ils trouvèrent et achetèrent des courges qu’ils ramenèrent à la maison.
Chez Bsiré, la famine s’était tellement installée au point que certains membres de la famille commencèrent à crever. Et c’était plus qu’une bonne nouvelle lorsque Bsiré le père arriva à la maison avec les courges sur lesquelles ils se rabattirent comme des maudits ; ces aliments qui, quelques temps auparavant, n’attiraient aucune attention. Sans attendre, Bsiré et les siens avaient fini de cuire leurs aliments qu’ils mangèrent précipitamment. Du coup, la faim qui semblait se retirer pendant quelques moments, s’était encore malheureusement invitée, et reprit pleine vie dans son domicile.
Pendant ce temps, Dami, les bébés hyènes, ainsi que leur maman, gloutonnes comme cela s’entend, prirent, au moins cette fois-là, les précautions de ménager les maigres provisions pour survivre à la faim dont ils ne voyaient pas encore arriver la fin.
Très envieux et éprouvé, Bsiré pensa beaucoup et décida alors d’aller soutirer les courges de Dami. Il fit manger de l’herbe à ses petits à faire écumer leur bouche. Tous arrivèrent chez Dami en titubant. Dami et sa famille se préparaient à cuire leurs courges.
- Dami, nous avons acheté ces courges, mais ce n’est pas de la bonne nourriture ; c’est un véritable poison. Regarde mes enfants mourant. C’est à jeter sans tarder !
Voyant cette scène inédite, Dami, sans se fatiguer de trop penser et de goûter ses aliments convoités, décida de s’en débarrasser ; elle les jeta coléreusement dans la broussaille.
Bsiré, qui avait surveillé son amie pendant que cette dernière se débarrassait de ses aliments, vint de nuit avec sa famille ramasser les courges pour les ramener chez lui jubilant, tandis que la pauvre Dami cocue commença à mourir, affamée, avec toute sa famille.