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HOMAGE A AMATH SECK

 Père fondateur du Casa Sports

Par Mamadou Mané, historien

En cette fin novembre 2022 qui marque son 90e anniversaire, et suite au doublé réalisé, en juin dernier, par le Casa Sports sorti vainqueur et du championnat national de la Ligue 1 de football et de la Coupe du Sénégal, Amath Seck mérite que les membres de ce club qu’il a fondé, ainsi que d’autres compagnons et amis dont je suis, nombreux à bénéficier de sa sollicitude, lui rendent un vibrant hommage. Un hommage qui soit à la mesure de son parcours de vie activement et remarquablement mis au service de son pays, de sa région et de sa ville, Ziguinchor, où il vit le jour le 30 novembre 1932.

Pour ma part, celui que je lui rends à travers ce témoignage, pour sobre qu’il soit, se veut pleinement empreint d’affection, de respect et d’admiration pour cet esprit brillant, d’une rare finesse, instituteur de formation sorti de la prestigieuse Ecole Normale William Ponty de Sébikotane, après avoir passé le premier cycle de ses études secondaires au Collège Moderne de Thiès, ancêtre de l’actuel Lycée El Hadj Malick Sy de la même ville ; un homme d’action, persévérant dans tout ce qu’il entreprend ; un homme pétri de valeurs héritées d’une ascendance dont il porte fièrement les deux versants : le versant maternel diola diembering du Kassa et le versant paternel wolof du Saloum.

En effet, l’on est, au premier contact avec Amath Seck, d’emblée frappé par non seulement par sa haute et élégante silhouette, mais aussi sa simplicité, sa bonhomie, son abord facile, son sens élevé du partage et sa disponibilité à toujours rendre service en toute discrétio  quels que soient le problème posé et la qualité des solliciteurs qui viennent à lui. Si bien que son domicile, tant à Ziguinchor qu’à Dakar où il a fini par s’installer à partir de 1970, ne désemplit jamais, l’accueil y étant toujours chaleureux et fraternel.  Ce sont là des traits de caractère qui en ont fait un homme au commerce agréable que l’on ne se lasse pas, comme c’est mon cas, de fréquenter pour avoir l’insigne honneur de figurer dans le cercle, toujours large, de ses amitiés. Car Grand Amath, comme il m’arrive de l’appeler affectueusement, a l’amitié fidèle et constante.

C’est dès mon adolescence à Ziguinchor, ville dont je suis, comme lui, natif, que son nom commençait à m’être familier, tant Amath y était connu pratiquement de tous. Il s’y distinguait par ses intenses activités dans les milieux de la jeunesse et des sports où sa disponibilité légendaire, son engagement, son sens de l’initiative et de l’organisation, ajoutés à ses qualités de rassembleur, faisaient merveille, lui qui est un touche-à-tout plein de bienveillance et d’une rare efficacité pour tout ce qui a trait à l’animation culturelle et sportive de la ville.

D’où les responsabilités et charges qu’il ne tarda pas à y exercer comme celles de Président de la section de football du Foyer de Casamance, alors club fanion de toute la région naturelle. Cette charge sportive, il lui arrivait de la cumuler avec celle d’entraîneur en cas de vacance du poste ou pour assister le coach titulaire. Ce fut le cas lors de la finale de la Coupe du Sénégal en 1962 à laquelle il conduisit le Foyer de Casamance qui la perdit face à la Jeanne d’Arc de Dakar.

Mais ce n’était que partie remise. En effet, 17 ans plus tard, en juillet 1979 précisément, le Casa-Sports, club héritier du Foyer de Casamance suite à la réforme du football au Sénégal, dite réforme Lamine Diack du nom du ministre des Sports d’alors aujourd’hui disparu, remporta la Coupe du Sénégal face, cette fois-là, au Jaraaf, un des grands clubs fanions de la capitale. C’était en présence du Président Senghor, alors Chef de l’Etat. Evénement mémorable que ce sacre du club ziguinchorois qui donna lieu, dans toute la région naturelle de Casamance, à des festivités d’une ampleur, d’une ferveur et d’une mobilisation sans précédent !

 A propos du Casa-Sports, et pour rester toujours avec Amath Seck, rappelons que c’est lui qui, en le portant sur les fonts baptismaux comme indiqué plus haut, lui donna le nom de Casamance Sporting Club, abrégé en Casa Sports. Celui-ci naquit en 1969 de la fusion du Foyer de Casamance évoqué plus haut avec d’autres équipes de la ville telles que le Galia et l’USC pour le football, le Trésor Sporting Club pour le basket-ball et le Ziguinchor Etudiant Club pour le hand-ball, sans oublier la section d’athlétisme, autrement dit un Casa Sports multidisciplinaire comme l’exigeait d’ailleurs le réforme Lamine Diack. Et il est heureux que les dirigeants actuels du club en soient reconnaissants à Amath et le lui expriment à chaque occasion. Ce sera encore le cas en cette fin d’année 2022, lors des manifestations d’hommage du club à son fondateur aujourd’hui nonagénaire.

Rien d’étonnant alors à ce que tant d’engagement au service de sa ville et de sa région l’ait conduit aussi à la politique aux débuts des années 1960. Amath Seck gravit vite les échelons au sein du parti au pouvoir de l’époque, l’UPS (Union Progressiste Sénégalaise), devenu par la suite le PS (Parti Socialiste), pour être, une dizaine d’années durant, le Secrétaire Général de la section MJUPS (Mouvement des Jeunes de l’UPS) de l’ensemble de la Casamance, sans pour autant délaisser ses activités sportives et culturelles qui lui restent, à ce jour et malgré son grand âge, chevillées au corps.

C’est dans ces circonstances qu’il connut et fréquenta assidûment Emile Badiane, un des leaders politiques charismatiques de l’époque, fidèle compagnon de Senghor, qui, en mentor et jusqu’à son rappel à Dieu survenu en 1972, avait Amath dans le cercle de ses très proches. Au point que, Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle, il le nomma, eu égard à ses qualités reconnues de pédagogue émérite, Chargé de cours au Centre Régional d’Enseignement Technique (CRET) de Ziguinchor où il servit pendant 10 ans (1960-1970). Au sein du MJUPS, Amath, toujours servi par son sens des contacts et son esprit d’ouverture, comptait plusieurs camarades parmi lesquels les Amadou Racine Ndiaye, Amadou Sam Wagne, Abdel Kader Sabara, Moustapha Niasse et tant d’autres jeunes de sa génération avec qui il tissa de solides liens d’amitié.

 En Casamance, il côtoya d’autres figures politiques comme les Charles-Bernard Jules (qui fut son beau-père), Antoine-Etienne Carvalho, Mamadou Abdoulaye Sy, Robert Sagna (tous les quatre, successivement maires de Ziguinchor), sans oublier les Edouard Diatta (père de feu Bruno Diatta, longtemps Chef du Protocole à la Présidence de la République), Ben Mady Cissé, Mamadou Doudou Cissé, Louis Dacosta, Mamadou Angrand Badiane, Cheikh Coly, Bassirou Cissé, Yaya Coly, Joseph Mathiam, Demba Koita, Ousmane Seydi  et bien d’autres….

 Avec le Pr. Assane Seck, un autre grand leader politique et Ministre depuis 1966 dans les gouvernements successifs des Présidents Senghor et Abdou Diouf, c’est au début des années 1970 que Amath Seck noua contact. Un contact qui avait abouti à une collaboration si fructueuse et durable que le Ministre, séduit par les qualités intellectuelles, la belle plume, le sens des contacts et le savoir-faire politique de Amath Seck, finit, à partir du milieu des années 1970, par en faire son Chef de Cabinet dans les différents départements ministériels qui lui furent confiés en ce temps-là. Leur compagnonnage, loin de s’interrompre à la retraite gouvernementale du Ministre d’Etat Assane Seck en 1983, se poursuivit jusqu’au rappel à Dieu de ce dernier en 2012. C’est dire la longévité et la solidité de l’amitié qui liait les deux hommes.

Tel est Amath Seck, l’homme aux multiples facettes et talents. Ma proximité avec lui, faisant suite, comme je l’ai indiqué plus haut, à l’admiration à distance que je lui vouais durant mon adolescence, remonte à la fin des années 1980 et aux débuts de la décennie 1990. Je venais de faire mon entrée comme Conseiller culturel à la Présidence de la République sous Abdou Diouf, après avoir passé trois ans à la tête de la Direction du Patrimoine culturel au ministère de la Culture où m’avait fait nommer un autre de mes amis et aînés, Makhily Gassama, qui dirigeait à l’époque ce département. Amath, fidèle à sa réputation d’être toujours disponible pour ses cadets qui, comme moi, ne manquaient pas de le solliciter pour sa grande expérience des cabinets ministériels et pour ses conseils avisés, me coopta alors parmi ceux de ses jeunes concitoyens ziguinchorois dont il n’était pas peu fier de la promotion à des postes de responsabilité dans la haute fonction publique du pays.

Depuis lors, se sont noués entre nous de solides liens fraternels et, surtout, une amitié qui, à ce jour, ne s’est jamais démentie. Une amitié qui m’a énormément apporté, tant Amath m’a fait bénéficier de son riche carnet d’adresses et de ses relations publiques en me faisant connaître de personnalités prestigieuses parmi lesquelles le Pr. Assane Seck cité plus haut. En effet, si, par la suite, j’ai pu compter parmi les proches de ce dernier, universitaire de renom, parrain de l’Université de Ziguinchor autant qu’éminent homme d’Etat qui nous a, hélas, quittés et qui m’honorait de sa chaleureuse affection paternelle, c’est grâce à Amath Seck pour qui ma reconnaissance demeure infinie.

  Joyeux anniversaire, Grand Amath! Que Dieu te garde encore longtemps parmi nous et te comble de ses bienfaits !

Mamadou Mané

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