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REPORTAGE: La place Jean-Paul II prie pour la paix en Casamance

Le désir de paix dans une région arrosée de sang pendant trois décennies, est perceptible lorsque que l’on met les pieds dans la commune de Ziguinchor. La Place Jean-Paul II, le cœur de la ville, affiche gaillardement les symboles de la paix : la colombe, la croix etc. Un monument dressé au milieu du rond point qui symbolise à la fois le désir et la promesse d’une paix définitive pour une région meurtrie par trente années de conflit irrédentiste.

Il est vingt heures. La nuit commence à dérouler son ruban noir sur la ville de Ziguinchor. Une commune qui s’est réveillée sous les pas pressés de ces braves femmes qui, chaque jour, panier sur la tête, défriche lopin de terre après lopin de terre, sur ce vaste champ du monde qui n’a de limite que notre propre finitude. Pourtant, rien sur ces visages abîmés par les « décharges » de rayons solaires, ne rappelle la haine, la rancœur. Elles vous saluent, le sourire aux lèvres, dans les langues du terroir, en souhaitant que la paix de Dieu vous accompagne : Kassoumay, en diola, kortananting, en mandingue et badiolagua, en balante.

Elles tiennent le petit commerce, presqu’à chaque coin de rue. Si elles ne sont pas dans leur jardin qui se trouve aux abords de la commune, ces braves femmes vendent des cacahouètes, des oranges, du poisson, des beignets etc. Elles refusent la fatalité, c’est pourquoi il est rare de rencontrer dans les rues de la commune celles qui tendent la main à la recherche de l’aumône.

Lorsque le soleil se cache derrière l’horizon, ces braves femmes regagnent leur foyer respectif. Dans le ventre de la commune résonnent, la nuit tombée, les pas hésitants qui tirent ces frêles ou robustes silhouettes exténuées par le dur labeur de la journée.

Du rond-point Jean-Paul II, centre névralgique de la ville d’où partent les principales avenues, l’on ne peut résister au charme d’une ville animée qui charrie son parfum de naturel. Ici les populations fonctionnent à la première intention, parce qu’elles ne portent pas de masque. Elles sont tout simplement authentiques.

Ce rond-point baptisé Place Jean-Paul II est des plus fréquentés. Au milieu, se trouve un bassin contenant de l’eau et d’où s’élève une pyramide faite de pierres, qui s’apparente plutôt à une termitière. Et sur le tôt de laquelle est nichée une colombe, cette espèce de pigeon au plumage blanc, symbole de la paix. Mais la colombe est dans une position ambiguë. L’on ne sait pas trop si le pigeon au plumage blanc vient de se poser ou est-il en train de prendre son envol.

Le monument est délimité à l’ouest par le mur de la Cathédrale Saint Antoine de Padoue. Une fresque murale sur laquelle sont peintes d’autres colombes qui, cette fois-ci, prennent leur envol. De l’autre côté du mur, l’on aperçoit les branches de cocotiers qui rappellent, à bien des égards, les rameaux d’olivier, des fleurs et une croix lumineuse. Une croix inondée de lumière blanche et bleue. En la contemplant, l’on a l’impression que la lumière blanche sort des entrailles de la terre et plus elle s’élève vers le ciel, plus elle épouse la couleur de l’atmosphère, le bleu. La croix symbolise l’élévation, la Miséricorde, la paix.

La colombe, la croix, les rameaux d’olivier, tout cela rappelle les écrits bibliques. C’est l’épisode des 40 jours d’inondation où Noé, sur son arche, sauve de la noyade la totalité des espèces animales de la planète. Le seul signe de la terre ferme vint d’une colombe, signalant la fin des précipitations et le début de la paix sur Terre où les animaux et les hommes pourront de nouveau prospérer. Ajoutons que l’esprit de Dieu est symbolisé par l’image d’une colombe. En effet, ce symbole est souvent accompagné d’un rameau d’olivier.

La Place Jean-Paul II symbolise à la fois le désir et la promesse de paix pour une région meurtrie par trois décennies de conflit. Une situation de ni guerre ni paix, traduite par cette position ambiguë de cette colombe nichée sur le toit de ce bloc de pierre. Son regard tourné vers le port, l’océan, faisant face à la rue Javelier, fait penser à l’immensité du chantier de la paix. Que la colombe prenne son envol et souffler l’esprit de Dieu dans les cœurs de tous ses enfants !
Bacary Domingo Mane

* Un reportage réalisé en 2010, à l’occasion de ZigFest

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