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Lettre ouverte aux chefs religieux, politiques, coutumiers, dignitaires, et citoyen.nes du Sénégal.

Comment je m’appelle ou encore qui je suis importent peu. Je donnerai ma vie pour la paix et la cohésion sociale de ce pays, comme Mame Abdoul Aziz Dabaax nous l’a enseigné. Chers toutes et tous, chefs religieux, coutumiers, politiques, dignitaires et citoyen.n.es du Sénégal, une vie, ma vie n’est rien par rapport aux quatorze perdues en mars 2021, par rapport à toutes celles perdues pour l’accession à l’indépendance, la sauvegarde de la stabilité politique entre autres valeurs gagnées, chèrement et dignement. Les épigones que nous sommes, avons trouvé un État en construction et phasé au rythme de nos particularités et embasements. Ce pays tant cité en exemple, partout avec ses avancées et certes, ses manquements est resté jusqu’ici, d’aplomb. Le Sénégal est juste prodigieux. Il y a de beaux pays, de bons endroits mais le nôtre est un paradis sur terre. Lorsque nous nous réveillons là où dorment en paix, toutes ses femmes et ses hommes, érudits, dignes, saint.es, guerrier.ères, battant.es, savant.es, références, nous devrions nous sentir fiers et nous exalter de la chance que nous avons. Celle-là, inouïe d’être fille et fils du Sénégal. Regardons le verre à moitié plein !

Je suis Mouride, élevée dans la Tijannya, de famille Khadre, Mouride, Layenn, Peul, Léboue, Wolof, ayant passé mon adolescence avec des amis et voisins catholiques et lu la Thora, la Bible et le Coran avec comme modèle au-delà du Prophète Mouhamed (PSL), des proches, Mame Saliou, Mame Abdou, Mame Baaye, Al Makhtoum, Mame Diarratulah, Aline Sitoé, Monseigneur Jacques Sarr, des professeurs d’école, Cheikh Anta Diop, David Diop, Mamadou Dia, Ndoumbé Ndiaye, Thioumbé Samb, les exemples ne tiendraient pas sur les deux centaines de pages et chacun.e, selon les affinités aura à y enlever ou à y rajouter quelqu’un. Je me sens partout chez moi au Sénégal. Préservons cette magnificence !

Depuis mars 2021, la cohésion imparfaite, le respect de l’autre, le droit d’ainesse, la place spéciale que nous avons choisie de céder à nos hommes religieux, tout s’écroule, tel un château de carte. Depuis cette période, des collègues, des frères, un fils, une fille et ses parents, sa famille, des amis, se considèrent avec méfiance, évitent certains sujets de conversations ou s’attaquent frontalement au point de jeter en pâture tout ce qui les lie. Les Sénégalais échangent en termes d’ethnies, de régions, de religions, de peuplades, de classes sociales. Nous ne cherchons que le pire chez l’autre, quitte à lui inventer une vie, un passé, un quotidien et non pour parer l’image de notre cher Sénégal. Celui-là, pour lequel des anciens combattants ont défendu leur honneur ; des rois, reines, personnes lambdas ont affronté le colon au prix de leur sang ; des politiques ont risqué leur vie, des scientifiques ont choisi de se terrer dans des laboratoires à jamais par grandeur et foi ; des saints ont risqué leur vie en traçant un voie du salut, défiant colons et condescendance, mettant en avant la force de l’homme noir et la protubérance de l’Africain du seuil du continent jusqu’ en profondeur de ce dernier. Personne ne se doutait que le Sénégal en arriverait là aujourd’hui : qu’un jeune qualifie son ainé de « nul » et que ce dernier lui rétorque qu’ils sont un groupe, un parti de « menteurs » … et ce n’est pas le plus grave. Enfants, nous n’entendions jamais ces mots en wolof, à la télévision. Je vous passe, de ce que nous apercevons à l’Assemblée nationale où l’on traite de bonnes gens, ministres et chef d’État, de meurtriers, d’homme à femmes, de violeurs, de voleurs, de détourneurs de deniers publics sans compter l’objet de l’emprisonnement de deux députés ayant  violenté une femme, une sœur, une mère. Arrêtons de nous manquer de respect et de heurter la liberté de l’autre.
Je ne finirai pas sans m’arrêter sur la sacralité de la parole donnée qui est un principe de notre patrie, de nos religions et coutumes ; sur le mensonge qui peut embraser un peuple ; sur le sens de la vie humaine, de l’éthique, de l’humanisme et de l’humanité. Que la politique ne nous prenne pas nos vies. Nous sommes des père, fils, fille, mère, sœur, frère, le pouvoir d’ici-bas ne vaut pas la peine de sacrifier ascendance et descendance.

Je me permets de prier notre Mame, notre modèle et fondamentalement détenteur d’un pouvoir au-delà du politique au Sénégal. Encore une spécificité ! En 2021, vous aviez su calmer les exaltations par un discours historique. Al Mountakha, grand-père au sourire d’une fierté nationale, patriotique, votre petite-fille, talibé vous implore solennellement et par la Baraka de votre grand-père, guide, celui-là que vous représentez pour nous Mouride, sur terre, Cheikh Ahmadou Bamba, Khadimou Rassoul, Serigne Touba. Mame, par la Grâce d’Allah, on a besoin de votre intervntion. Qu’un mandat de plus n’enflamme pas notre Sénégal ! Qu’un procès d’un prétendu viol, ne divise pas le Sénégal, des familles, des frères et sœurs, père et mère, mari et femme, marabout et talibé, professeur et élève, étudiant ! Que d’autres vies ne soient pas vainement perdues pour des raisons fallacieuses ou lourdement politisées au point de faire passer une jeune femme, fille, mère, pour une harengère. Le Sénégal de la « Téranga », stable politiquement et socialement, ce pays aux cimetières mixtes, familles hybrides, là où catholique sert au musulman et inversement, cette terre que Sérère, Pulaar, Wolof, Djola, Balante, Mandingue et j’en passe, partage sur le fond d’un cousinage à plaisanterie, mérite d’être porté au plus haut sommet de l’exemplarité, de la paix que nous ont laissé saints, savants et politiques.

Chers compatriotes, ne nous rabaissons pas plus bas que terre, nous aurons tous, le non-choix, un jour, bientôt ou plus tard de plus que la frôler. D’être sous terre. Aurions-nous la chance, le choix de revenir, sauver ce qui ne pourra plus l’être ? Non !
L’on répète sans cesse que ce pays aurait besoin d’un « Ndeup » national, je veux bien y croire, en tant qu’arrière-petite-fille de Fatou Ndoye, de Rokhaya Thiaw, lébou du Cap-vert. Pourtant, j’ai la ferme conviction que nous avons juste besoin de dire la vérité, de ne point faire dans la cupidité, le dénigrement, reniement… Nous avons besoin de nous auto-éduquer, de nous humaniser de jure, dans la foi et les principes de vie.

Femmes et hommes politiques, cessez de nous prendre en otage ! Nous parlons toutes et tous aujourd’hui de ceux-là, parmi vous qui n’êtes plus de ce monde, certaines familles sont fières des hommages rendus à leur père ou mère, d’autres le sont un peu moins. Souvenez-vous en ! Évitez d’être parmi ceux-là qui inspirent encore regret et mépris ! Nous avons tous et toutes des comptes à rendre à notre géniture puis à notre Seigneur ! Essayons d’être dignes de ceux et celles que la vie nous a confiés et méritoire de notre patrie le Sénégal! Enfin, ce pays n’a pas besoin d’un procès public ou d’une quelconque théâtralisation telles les affaires « Lewinski » ou « Nafissatou Diallo » ! Que les ardeurs se calment ! Que des vies soient sauvées, épargnées ! Que la justice sénégalaise regagne ses lettres de noblesses ! Que les voix indiquées se fassent entendre pour que les valeurs reviennent au-devant ! Que la rue ne soit pas un recours ultime ! Que nos armes, nos appareils répressifs soient préservés ! Le danger est ailleurs, mais tout près avec les jihadistes et autres groupes ayant pénétré de plein fouet le Sahel, avec la fille du membre de l’Ordre nouveau et non moins candidate malheureuse à la dernière présidentielle en France qui atterrit à Dakar, alors que du haut de ses 54 ans, elle s’est nourrie et vit encore d’injures adressées aux Africains, aux migrants, aux Musulmans… Le Sénégal est encore en Afrique, que je sache. Sauvons-nous ! Et retrouvons nos bonnes mœurs d’alors: le «ngor», le «jom», le «jomb-jomb», le «lo momul bakko fa», le «sutura», le « fuleu », le « fayda », le « thiofeel »… Que serions-nous, sans nous ?

J’aurai pu m’adresser à nous en mettant en avant des arguments scientifiques d’une sociologue politiste, faisant usage d’État de droit, de République, de gouvernementalité et de biopouvoir ou encore de démocratie et de justice sociale. Mais malheureusement ou heureusement, je me serai adressée à sans doute, moins de 20% d’entre-nous, alors que ce pays est Nôtre, nous qui l’aimons au point d’être prêt à y laisser notre dernier souffle, pour le maintenir debout. Car, on nous tue mais on ne nous déshonore pas !

Que la paix soit avec nous et en nous !

Ndeye Astou NDIAYE

Citoyenne africaine du Sénégal

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