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L’ŒIL DE L’EXPERT  –  SONKO, LE NON-VERBAL QUI EXPRIME L’AUTORITE

PAR BACARY DOMINGO MANE

Deux chroniqueurs de WEB TV (télévision en ligne), ont déclaré que le leader de Pastef, Ousmane Sonko, voulait manipuler l’opinion, en glissant ses mains derrière le dos, pour faire croire qu’on l’a menotté. C’était lors des évènements de mars 2021, quand les forces de l’ordre ont arrêté son cortège pour l’obliger à changer d’itinéraire.

Ces chroniqueurs occasionnels se sont-ils vraiment interrogés sur le sentiment qui traversait Ousmane Sonko en ce moment-là ? A moins de lui dénier son humanité. Puisque tout être humain a des reflexes face aux agressions extérieures. Les gestes authentiques (et non appris) traduisent notre climat mental.

La synergologie nous apprend que chaque sentiment présent dans notre conscience se traduit automatiquement en gestes, postures ou  mimiques (GPM)[1]. Chaque pensée entraine, par conséquent, un effet gesticulatoire.

Au lieu de chercher à comprendre ce que ce geste traduit, nos chroniqueurs ont choisi le raccourci de la diabolisation qui les installe soit dans l’ignorance, soit dans la mauvaise foi.

C’est un geste que l’on observe souvent, en Afrique, chez les personnes d’un certain âge portant le boubou. On peut être amené à penser que le geste sert juste à éviter que le boubou se salisse. Pourtant, ce n’est pas toutes les personnes portant le boubou qui font régulièrement ce geste.

C’est pourquoi l’explication servie est à la fois dérisoire et superficielle. Elle ne tient pas compte de la nature profonde de celui qui fait le geste. Glisser ses mains derrière le dos, appartient alors  à la famille des gestes dits «projectifs», c’est-à-dire qui permettent de projeter l’état d’esprit de la personne que le fait.

Le même geste fait aussi penser à la posture du professeur dans l’amphithéâtre ou de l’enseignant dans sa classe surveillant un contrôle écrit. Son état d’esprit peut traduire à la fois la réflexion et la distance.

La différence dans la distance : confiance en bandoulière 

Dans le cas qui nous intéresse (celui de Sonko), la posture du leader de Pastef semble indiquer qu’il ne voulait pas être approché ni touché par les forces de sécurité. La couleur blanche de son boubou vient renforcer le sentiment d’un homme pur qui ne veut pas être souillé.

Comme le souligne Joe Navarro[2] c’est une posture sociale qui permet à l’individu qui fait ce geste de marquer sa différence. Sonko voulait ainsi afficher, peut-être inconsciemment, son statut. Le pastéfien en chef est traversé par un sentiment de supériorité, de confiance et de pouvoir.

Ce comportement de domination et de confiance expose en même temps l’individu, puisque le geste (mains derrière le dos) libère la zone sensible de l’individu (la poitrine, le ventre et le bas-ventre).

Seul un homme confiant peut prendre un tel risque.

Bacary Domingo MANE (mondeafrik.com)


[1] Messinger, Joseph : Le langage des gestes pour les nuls, Éditions First-Gründ, 2009

[2] Navarro, Joe : Ces gestes qui parlent à votre place, Ed Pocket, 2018, P. 360 pages

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