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Le mouton résiste à la Covid

Il pensait, cette année, être sauvé par le coronavirus, en se mettant à l’abris de la folie dépensière à l’occasion de la fête de Tabaski. Il s’est même permis un sommeil matinal bercé par un calme où l’insouciance l’emprunte à la naïveté juvénile. Siga (nom d’emprunt) comptait sur le bon sens de son épouse, en ces temps de pandémie, pour se contenter  d’une fête ordinaire.

Quelques kilogrammes de viande achetés à la Sogas (Société de gestion des abattoirs du Sénagl, ex Seras), des condiments, des robes et grands boubous rabibochés etc.

Mais lorsque la mère de ses enfants se présente avec sa liste de besoins, Siga est dérouté. Un mouton à 300 000 F Cfa, 20 mètres de Getzner, un collier en or, des chaussures et un sac «griffés», un barbecue charbon.

Il prend la liste, fixe du regard son épouse et s’enferme dans la chambre à coucher, sans laisser échapper un seul mot de sa bouche. Siga vient d’être foudroyé par la «maladie de la Tabaski»  dénommée le «Complexe du mouton» dont les symptômes sont : maux de tête, hypertension, convulsions, délires…

Siga est victime du délire de persécution. Dans le brouillard de ses hallucinations, il voit des moutons partout : du balcon, de la chambre à coucher, du salon, des toilettes, de la terrasse de sa maison…Des moutons imaginaires qui ne peuvent, hélas, donner le sourire aux enfants, encore moins à une épouse qui souffre…dramatiquement, elle aussi, du «Complexe du Getzner»

Dans la salle de consultation, la victime du «Complexe du mouton », allongé sur le divan, déverse sa colère sur une société qui creuse les disparités et soumet ses membres à l’intenable course de l’inégalité.

Siga-le-persécuté finira par craquer, en s’endettant. Cédant ainsi à la «conspiration», au jeu de dupes… La société lui met la pression et l’accepte en toute culpabilité. Il a renoncé de vivre pour lui-même, préférant regarder le monde avec les lunettes des voisins, amis, camarades, compagnons…Le persécuté est devenu un mouton… de Panurge.

Le «Complexe du mouton», c’est ce regard oblique, malicieux, déformant, à la limite traumatisant, du voisin. Un regard qui rend malade, réellement malade ! Bonne fête !

Bacary Domingo MANE

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