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CORONAVIRUS AU SENEGAL – Un univers, plusieurs soleils et donc plusieurs levers et couchers du soleil

Par Pr Alassane KITANE

Imaginons ce que serait notre planète si elle était illuminée par plusieurs soleils ! Il nous serait impossible de nous orienter et toutes les cartes du monde seraient fausses. Les astrophysiciens me répondraient que c’est bien le cas, car le soleil n’est qu’une étoile parmi les milliards d’étoiles qui constellent la voie lactée. Que belle et juste serait leur réponse, mais elle confirmerait bien mon allégorie.

Si Dieu (ou la nature) a abaissé le soleil et élevé les étoiles, c’est bien pour nous éviter une telle anarchie cosmique. Nous savons que notre si familier soleil est loin d’être le plus grand astre de notre galaxie, mais l’ordre veut qu’il brille sur nous plus que les autres. Elles sont toujours là, mais on ne les voit pas le jour : l’harmonie cosmique a un prix. Il faut qu’elles s’éclipsent le temps de laisser le soleil faire son travail vital pour la terre. Cette éclipse n’est pas une déchéance, c’est le signe de leur grandeur, la preuve de leur élévation, de leur noblesse céleste.

Un univers avec plusieurs levers de soleil aura forcément plusieurs crépuscules, or comme dit Baudelaire « le crépuscule excite les fous », la nuit met « les ténèbres dans leur esprit ». Quand l’excitation fait vivre, la raison et la tempérance deviennent des crimes. Que le crime soit un « phénomène normal » alors ! Il y a des êtres qui se nourrissent de crépuscule, la lumière les dérange et les enrage ; et pourtant, c’est bien la lumière qui fait vivre le plus grand nombre. On voit bien que, sous ce rapport, c’est l’absence de ce crime étincelant qui sera la source de tous les crimes.

Nos cœurs de croyants ne peuvent pas être des monuments funèbres où est gravée cette épitaphe : « Requiem aeternam ratio » (que l’on nous pardonne cette mauvaise parodie de Nietzsche !). Car sans la raison, notre « maître à tous », nous ne mériterions pas d’être les vicaires de Dieu sur terre. Le jour où l’on verra des animaux vénérer des dieux, nous aurons le droit de congédier la raison de nos affaires. En attendant cette apocalypse de la logique, acceptons la transcendance de la raison et de son incarnation historique : l’État. Ne profitons jamais de sa faiblesse conjoncturelle pour saper ses fondements, nous pourrions bien avoir besoin de lui avant la fin même de notre sinistre entreprise.

L’autorité de l’Etat n’est pas obligée de s’exprimer par la force, elle peut bien prendre la voie et voix de la diplomatie. C’est vrai que la laïcité sénégalaise est unique au monde, qu’elle fait partie du charme de notre démocratie. Mais l’Etat restera toujours l’Etat. Sous ce rapport, j’aurais été à la place du Président de la république, j’irais dans les cités religieuses et leur demanderais de surseoir à toute manifestation religieuse. Auparavant, je m’adresserais directement à la nation, car quand l’ Etat est en difficulté, la nation devient son pilier et son bouclier.. Nous n’avons pas le droit de sous-estimer cette maladie ! Un simple rhume peut handicaper un travailleur : imaginons une épidémie et son impact sur notre très faible économie. !

Alassane K. KITANE

Professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck de Thiès

Président du Mouvement citoyen LABEL-Sénégal

Mon dieu, ils cherchent un cheveu dans le saint Coran !

Il est vrai que Dieu montre ses signes aussi bien dans les « grandes » choses que dans celles supposées « petites ». Le moustique et la montagne sont deux des innombrables signes de Dieu, mais quelle doit être notre attitude face aux signes ? Les hommes raisonnables sont censés méditer ces signes au lieu de s’exalter ou de se déshumaniser dans l’émoi et l’aveuglement puéril. Sans cette attitude rationnelle la politique de confinement démographique pour endiguer ce covid19 ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau.

Le plus grand ennemi de la lutte contre cette maladie est la situation de confinement mental dans lequel se trouvent nos compatriotes. C’est d’ailleurs ce confinement mental qui sera le principal vecteur de propagation de cette maladie. On aura tout vu et entendu dans ce pays : chercher un cheveu dans le Coran ! Cette folie est probablement un signe parmi tant d’autres. Comme un cheveu dans la soupe de la politique de riposte proposée par les autorités, un cheveu dans le Coran vient nous distraire et nous détourner de ce qui est aujourd’hui notre premier devoir citoyen, à savoir l’hygiène. Voilà ce à quoi mène l’anarchie religieuse qui sévit dans ce pays : une religion plusieurs divinités !

Pour combien de temps encore allons-nous stagner dans cet « état théologique » signe d’une « anarchie mentale » (Comte) qui nous empêche d’arpenter allègrement les boulevards de la science et du progrès ? Nous voyons partout des forces occultes, des êtres et des situations surnaturels, pendant ce temps, les choses réelles, celles qui font le monde, nous échappent et tombent dans l’escarcelle des autres. Pauvres de nous, éternels gamins de l’humanité avec nos gamineries religieuses et folkloriques plus qu’inhibitrices. Qui pour dire à nos concitoyens qu’il n’y a pas au monde un pays qui s’est développé par la spiritualité et la magie ? Ils ont créé les réseaux sociaux pour davantage démocratiser le savoir, nous nous en servons pour cultiver et propager l’irrationnel !

Ces charlatans jouent avec la peur de nos concitoyens, ils l’exploitent pour se hisser au-dessus d’eux, pour prendre la place de Dieu en son absence (parce qu’ils l’ont tué) depuis longtemps. Il fallait trouver un exotique dont le rêve serait salvateur pour nous. Pendant que des hommes, dans d’autres pays, s’activent pour s’organiser rationnellement, nous nous contentons de rêver ! Un cheveu dans le Coran : on dirait une chanson de cirque ! En définitive l’exotique n’a pas rêvé, c’est nous qui rêvons parce que nous avons une vie de songe. Un petit cheveu dans le Coran : ils ne se rendent même pas compte que c’est leur propre cheveu (sans doute dépité d’avoir poussé sur une tête qui pense de cette façon) qu’ils cherchent dans le Coran ! Hier nous avons servi de chair à canon, aujourd’hui nous servons d’esprit à l’esprit du diable.

Alassane K. KITANE

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