A l’école du Covid 19
Par Mme Diama Badiane
Le coronavirus vient nous rappeler ce que nous savions déjà, mais avions oublié par excès d’égoïsme : l’importance capitale des relations humaines pour la survie de l’homme. Il nous rappelle que quand le devoir appelle, c’est par l’abnégation qu’on répond: le personnel de Santé nous montre l’exemple. Le coronavirus montre le rapport universel que l’homme entretient avec la mort. La mort n’est pas banale pour l ‘homme. Si elle est inéluctable, l’homme semble la fuir : masques par-ci, confinement par-là, gestes barrières par là-bas ,tout cela pour échapper à ce mortel virus. De wuhan à New York , de Paris à Téhéran, du cap au Caire tout le monde lutte pour échapper à la mort. Il révèle aussi le caractère universel du devoir de solidarité chez tout homme. Ainsi, l’homme est solidaire par nature, serait-on tenté de dire. Est-ce-que ce n’est pas alors son existence sociale qui finit par le dépraver ? Et ce, à tel point qu’ on se demande si la solidarité est une prédisposition innée qui s’actualise ou une construction sociale qui s’acquiert ? De toute évidence un monde dominé par des contre-valeurs, le repli sur soi-même, … a été bouleversé par un minuscule être. Comment la suprématie de l’homme a-t-elle pu être perturbée par un virus ? Est-ce pour un re-questionnement sur le sens de notre existence ? Qui sommes-nous ? Comment devons-nous vivre ensemble? Suis-je le garant de la sécurité de mon semblable ? Le Covid-19 est venu nous rappeler le sens de notre existence. Il donne sens à notre existence et réveille la sociabilité qui sommeille en nous. Il nous rappelle que l’homme n’est rien sans ses semblables. Ainsi, le Covid-19 est venu aplanir tous les différends et faire naître en nous un grand élan de solidarité. Ainsi cette crise sanitaire mondiale est une alerte qui rappelle à toute personne sa responsabilité. Je dis bien une personne dans la mesure où l’homme n’est rien sans la société, et c’est la société qui fait de lui ce qu’il est.
Pour avoir une société ,il faut que ses membres entretiennent des relations et se rendent des services mutuels, lesquels se consolident grâce à la solidarité. Ainsi, c’est un impératif de prendre conscience de la nécessité de la solidarité pour la survie de l’homme. De ce fait le coronavirus nous incite à renoncer à toute idée de hiérarchisation des peuples, des hommes, des races, des ethnies, des classes sociales, des États, des continents, et de prendre conscience de l’universalité de la condition humaine.
Ce virus a pu déconstruire toutes les idées stéréotypées et hiérarchisées depuis l’Antiquité. Vu sous cet angle, le covid.-19 peut être paradoxalement bénéfique si on en profite pour corriger notre société en redynamisant nos valeurs culturelles, républicaines et même civiques. A notre avis une tâche s’impose : celle d’essayer de résoudre rationnellement la crise, en dégager les tenants et les aboutissants, les implications socioculturelles, politiques et économiques. Ce qui constituerait un levier puissant pour un changement multi- sectoriel. Serions-nous capables et prêts à nous y mettre ?
En tout cas c’est à cette condition que nous pourrons véritablement assumer notre statut de personne, pour éviter de demeurer de simples individus. Car le propre de la personne est d’évoluer dans une société en tant qu’ être sociable, altruiste, solidaire, affable, conscient de toute la valeur des autres, malgré leurs différences. Sans cela nous restons au stade d’individu. La spécificité de l’individu c’est qu’il est égoïste et replié sur lui-même, tandis-que la personne a déjà reçu la socialisation par le biais de l’éducation; ce qui fait qu’elle doit être altruiste, c’est-à-dire ouverte et serviable à ses semblables. Aujourd’hui ce dont la société a le plus besoin, c’est de redonner sens à notre existence , en œuvrant autant que possible pour la cohésion sociale. En définitive, il nous faut promouvoir en toutes circonstances les valeurs sur lesquelles reposent le vivre ensemble solidaire.
Diama Badiane, professeur de philosophie