Chapeau bas les «Président » !
PAR BACARY DOMINGO MANE
Ils étaient tous Président…Ces candidats à la présidentielle du 24 mars 2024. Ils avaient osé, durant deux semaines de campagne électorale, «narguer » le destin. A présent, c’est à eux d’assumer la tragédie de l’acte joué. Ils étaient dans les nuages du prestige, de la gloire, les yeux dans les étoiles. Ne réveillez pas alors, je vous en conjure, le Président-candidat ! Le lundi 25 mars, il fera jour, pour les 18 «naufragés» du scrutin du dimanche.
Ils étaient tous Président et cela se voyait : escorte, gardes du corps, gyrophare, ambulance, kinésithérapeute, traiteur, chef protocole…Ajoutez à cela, la démarche à pas mesurés, la mimique, le timbre de la voix… Ils étaient tous Président et avaient tort de ne pas se prendre au sérieux. En bons comédiens, ils avaient, parfois, poussé le bouchon de la mise en scène un peu loin…
Les passants, qui les croisaient, ne se privaient pas de les admirer. Sans faire attention à l’étoffe et aux grimaces du corps, ils se contentaient juste de ce que le Président-candidat exhibe, sans chercher à aller au-delà. Le tapis rouge lui était déroulé. Personne n’osait commettre l’imprudence de trop l’approcher, au risque de se voir éconduire par des bodyguards jouant, parfois, les «méchants».
L’entourage, les militants et sympathisants, faisaient partie des éléments du numéro ou de l’acte joué par le Président-candidat. Le titre de «Président» en bandoulière, le candidat à la magistrature suprême, se surprenait en train d’arpenter les couloirs du Palais, de humer le parfum des fleurs de son jardin, avant de s’affaisser dans le fauteuil douillet du maître des lieux. Ces sourires qu’il croisait, ces encouragements qu’il entendait, cette affection qu’on lui manifestait…parfois jusqu’à verser des larmes, tout cela constitue une sorte de voile.
Mais toute campagne électorale a une saveur de mort pour les vaincus. Seul l’Elu verra son existence se transcender en une nuit. Son entrée au palais est un long cheminement à travers le cimetière des amitiés, des alliances, des serments, des illusions perdues[1].
Bacary Domingo MANE
[1] Séguéla, Jacques & Saussez, Thierry, La prise de l’Elysée : les campagnes présidentielles de la Ve République, Ed Plon, 2007, P.15