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Oui, il n’est pas difficile de faire rapidement plus et mieux que lui, sans tambour ni trompette .

Par Mody Niang

Oui, je le réaffirme avec force : il n’est pas difficile de faire rapidement plus et mieux que lui. Oui, et sans tambour ni trompette. Cette tonitruante tournée «économique » n’y changera rien. Ai-je besoin de m’attarder sur cet événement outrageusement folklorique ? En avait-on vraiment besoin ? Quoi de plus normal, de plus naturel qu’un État aussi démuni que celui du Sénégal construise des hôpitaux et des routes pour ses populations ? Ce qui s’est passé à Kaffrine et  à Kédougou, et va se passer sûrement à Sédhiou et à Touba, est impensable dans les pays sérieux. Emmanuel Macron, Angela Merkel, Boris Johnson et autres chefs de gouvernements danois, norvégiens, suédois, ont vraiment d’autres chats à fouetter. Plus près de nous, il ne se passerait même pas en République des Îles du Cap Vert, ni au Ghana, ni au Botswana, ni à l’Île Maurice.

Pour revenir à notre sujet, cent (100) milliards auraient servi à construire les quatre hôpitaux. Avec autant de milliards, n’aurait-on pas pu construire cinq à six hôpitaux de même niveau si tout le processus s’était déroulé dans les règles de l’art, notamment si un appel d’offres international bien encadré avait été lancé ? Peut-être, en aurons-nous le cœur net si, après 2024, le pays est débarrassé de tout ce qui touche de près ou de loin au PDS, à son chef, à son fils biologique et à ses deux ‘’frères’’ (mburu ak soow)[1]. Combien de ces véhicules luxueux et gros consommateurs de carburant étaient-ils dans le cortège du président-politicien Jr ? Que ne gagnerions-nous pas en millions de francs CFA s’ils n’étaient composés que de modestes Peugeot, Toyota, Citroën ? Combien de centaines de millions seront-ils engloutis dans l’organisation des quatre événements ? D’où proviennent-ils ? Ne pourraient-ils pas être investis plus utilement ailleurs ?

Le président-politicien Jr, son parti, sa coalition et surtout son administration nous coûtent trop cher. Combien nous coûtent, pour presque rien, les ministres d’État à ses côtés ? Pour ne prendre que l’exemple de Mbaye Ndiaye – il en faut un  –, il nous coûte, en salaires et en indemnités, cinq (5) millions de francs CFA par mois (quatre millions de salaire et un million d’indemnité de logement) et 60 par an. Il nous en aura coûté 720 en 2024, s’il reste en poste jusque-là et ce sera sûrement le cas. Si on lui applique le fameux décret 2021-03 du 06 janvier 2021 relatif aux véhicules administratifs et allouant aux ayants droit, personnels de l’État et de ses démembrements (énumérés dans le texte) une indemnité forfaitaire globale mensuelle nette d’impôts (sic), il gagnera 700.000 francs par mois en plus.

Combien de ministres d’État de son acabit sont-ils nommés par le président-politicien ? Combien d’autres ministres ? Combien de ministres conseillers ? De conseillers spéciaux ? De chargés de mission ? D’ambassadeurs dits itinérants et qui ne sortent pratiquement jamais du pays ? De présidents de conseils d’administration ? De présidents de conseils de surveillance ? De présidents de conseils d’orientation et que sais-je encore ? Lui-même, qui nomme, ne le sait pas. Combien sont-elles, les directions générales, les directions et autres agences nationales dont les directeurs généraux et directeurs souvent venus de nulle part, perçoivent des salaires mensuels de cinq à six millions, sans compter les budgets qu’ils gèrent comme leur propre argent ?

Un président de la République sérieux ne s’encombrerait pas de tout ce monde coûteux et inutile pour l’essentiel. Sa première tâche serait de remettre l’administration centrale à l’endroit par de profondes réformes, cette administration de nos jours outrancièrement politisée, malmenée, sens dessus dessous, lourde, coûteuse et inefficace. Dans cette perspective, il commencerait par restaurer la fonction ministérielle gravement ternie et dévoyée depuis le 1er avril 2000. Des ministres, on en rencontre aujourd’hui de toutes les couleurs et à tous les coins de rue. Un président à la hauteur de sa mission devrait redonner rapidement son lustre d’antan à la fonction ministérielle, en lui redorant notablement le blason. Dans cette perspective, il en finirait sans calcul avec les gouvernements pléthoriques et encombrants auxquels le vieux président-politicien et son digne successeur nous ont malheureusement habitués. Il faudrait restreindre de façon drastique le nombre de ministres qui les composent. Un gouvernement de 15 à 20 ministres, c’est largement suffisant pour le Sénégal : 14 à 16 ministres, 2 à 4 secrétaires d’État ou ministres délégués.

Le nombre de ministres serait donc limité, et les ministres nommés à la hauteur de la fonction. Pas seulement d’ailleurs : les ministères seraient habillés, avec un contenu précis. Ainsi seraient déclinées, pour chaque ministère, les directions générales, les directions et les divisions. Il conviendrait aussi, peut-être, et pour des raisons d’efficacité et d’économie, de revenir sur la notion de chef de service régional, départemental, plutôt que de directeur régional, départemental. Nous comptons trop de directeurs au Sénégal, surtout de directeurs généraux. La direction devrait se situer au niveau national. L’organigramme aussi devrait être ressuscité. Dans beaucoup de ministères et nombres d’autres institutions, on ne sait plus ce que c’est. Pourtant, c’est un instrument de clarté et d’efficacité dans le fonctionnement de l’administration.

Un ministère donc, ce sont des directions, des services, des divisions, un organigramme. Quand il s’agit de son fonctionnement, on ne peut surtout pas s’empêcher d’évoquer le poste stratégique de secrétaire général. Ce haut fonctionnaire qui est la ‘’mémoire’’ du département, en assure la permanence, la continuité. Avec la gouvernance meurtrie du président-politicien Jr, le poste de secrétaire général galvaudé, est pratiquement généralisé. On compte aujourd’hui pratiquement autant de secrétaires généraux que de ministères. Des secrétaires généraux dont la grande majorité composée de femmes et d’hommes venus de nulle part sont loin d’avoir le profil de l’emploi. Tous les ministères, y compris les plus insignifiants, en sont dotés. Or, le secrétaire général d’un ministère, c’est un profil, un très haut fonctionnaire qui a blanchi sous le harnais de l’administration. On ne devrait donc pas en nommer à tout bout de champ. Seuls les gros ministères, avec plusieurs directions importantes, devraient en être dotés Et même dans ce cas, le fonctionnaire qui sera choisi pour occuper ce poste stratégique de l’administration, doit l’être avec un soin particulier, qui exclut toute considération partisane. Nous ne devons surtout pas oublier que le secrétaire général de ministère coûte aujourd’hui très cher, avec les salaires et indemnités exorbitants que le président-politicien Jr accorde à tout bout de champ. Un président sérieux qui revient à l’orthodoxie dans ce domaine nous ferait économiser beaucoup de millions employés bien plus utilement ailleurs. L’administration centrale serait donc non seulement allégée, mais dépolitisée et dépolluée. Elle devrait être une administration nationale neutre, au service exclusif du peuple, plutôt que d’un parti-État, donc une administration efficace et moins coûteuse. Nous y reviendrons d’ailleurs dans nos prochaines contributions.

En attendant, nous constatons que l’administration territoriale est aussi lourde, et certainement aussi coûteuse  que l’administration centrale. Il fut un temps où les régions étaient sept (7). Aujourd’hui, elles sont quatorze (deux fois plus), Les départements ont, eux aussi, plus que doublé : ils sont quarante-cinq (45), supervisant une pléthore d’arrondissements. Combien sont-ils aujourd’hui les gouverneurs, les préfets, les sous-préfets et leurs adjoints ? Si on considère que  leurs indemnités ont été sensiblement bonifiées depuis la gouvernance du vieux président-politicien et qu’ils sont tous logés et bénéficient de la gratuité de l’eau, de l’électricité, du téléphone et de la domesticité (celle-là payée en espèce, semble-t-il), combien coûtent-ils annuellement au contribuable sénégalais ? Il appartiendrait à une commission technique, à un audit, de comparer ce coût à leur apport dans le développement de leurs localités respectives et dans le Sénégal émergent en général, si toutefois il émerge.

Il conviendrait de s’interroger sérieusement sur la pertinence et la viabilité de toutes ces collectivités territoriales. On se souvient que, pendant longtemps, des départements érigés en régions sont restés pratiquement en l’état pendant plusieurs années, du point de vue des infrastructures tout au moins. Il en est de même de certains départements créés, qui ne comptent pratiquement pas de routes (pas une seule route goudronnée, parfois pas une piste), d’infrastructures administratives, sanitaires, scolaires ou, s’ils en comptent, elles sont dans un piteux état. Nombre d’arrondissements sont encore plus déshérités. Il faudrait donc envisager un audit profond de l’administration territoriale, en vue d’une profonde réforme qui aboutira, s’il y a lieu, à de fortes recommandations pour une meilleure prise en charge de nos collectivités territoriales. Le moment venu, il ne faudrait pas craindre de remettre carrément en cause l’existant. Une réforme administrative sérieuse vise davantage l’efficacité et les coûts que la volonté politicienne de quelque groupe de pression que ce soit. Elle ne devrait surtout pas servir de cheval de bataille aux gouvernants pour atteindre des objectifs politiciens, en créant facilement des collectivités territoriales coûteuses, dont la viabilité est loin d’être prouvée. Un audit profond de ces collectivités mettrait sûrement en évidence beaucoup de problèmes, notamment beaucoup de gaspillages de moyens humains, financiers comme matériels[2].

La gouvernance meurtrie du président-politicien Jr comporte bien d’autres niches de gaspillages de centaines de milliards, notamment au niveau des collectivités décentralisées comme des agences dites nationales. Des centaines de milliards qui pourraient servir, sans tambour ni trompette, à réaliser bien plus d’infrastructures qu’il n’en construit aujourd’hui. Nous les passerons en revue dans notre prochaine contribution, celle-ci étant déjà un peu longue pour nos compatriotes qui ne sont pas en général de gros lecteurs. Nous le ferons en nous fondant sur des faits précis et irréfutables, que nos détracteurs gagneraient à contester en nous opposant d’autres faits, plutôt qu’en nous couvrant d’injures grossières, qui n’auront aucun effet sur notre vieille détermination à dénoncer la mal gouvernance, sous toutes ses formes.

Dakar, le 4 juin 2021

Mody Niang


[1] Peut-être, en aurons-nous aussi le cœur net, en ce moment-là, à propos de ces routes construites par l’Agéroute, Promoville et autres agences (si elles existent). La largeur et l’épaisseur (du goudron) des routes qu’elles construisent sont-elles toujours conformes à celles déclarées et facturées ?

[2] Á ma connaissance, elles n’ont jamais été auditées.

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