Sénégal: El Habib SY, tu es parti, dans l’élégance ! Par Chérif Ismael AÏDARA (Confidentiel Afrique)
La presse sénégalaise est en deuil. Une nouvelle triste s’est propagée dans la soirée de ce lundi, jour férié pascal. Le destin imprévisible, échappant aux forces physiques d’une profondeur empirique, vient d’emporter notre brillant et talentueux confrère Mouhamadou El- Habib SY, ancien journaliste au bi-hebdomadaire République sis dans la grouillante rue d’Escarfait, faite de bric et de broc, au coeur de Pack Lambaye (Sandaga) avant de se frayer une carrière d’auto- entrepreneur de presse, éditeur du magazine En Vedette. Une publication qui paraissait malgré les difficultés que connait l’environnement médiatique, où tout ou presque s’arrache avec ingéniosité et résilience. Le confrère El Habib SY jouait sa partition. Il savait bien que les paradigmes du métier ont beaucoup évolué. Il s’y adaptait. Il se battait pour faire bouger les lignes. Comme un harpon qui attendait sa mise en eau. Je l’ai accueilli devant la porte des locaux du Journal République en 93. Il demandait à voir le patron Farès Attié, entrepreneur et imprimeur de son état qui s’était lancé nouvellement dans l’édition d’un tabloid du nom de République. Je l’ai conduit dans la salle de rédaction dans laquelle y travaillaient déja des grandes signatures: Yakhya KANE, Ibrahima MBODJ, Pape Ardo SOW, Moustapha SARR DIAGNE, Fara SAMB, Mamadou Traoré Junior et Sénior, Elie Charles Moreau, Amadou Khayar GUEYE. Ses premiers articles portant sur la crise universitaire étaient retentissants et passaient même dans la célébrissime Revue de Presse de Radio Sénégal. Sa chambre de la Zone B, où avait délocalisé entre-temps le siège de République était le QG du groupe restreint des journalistes, qui se plaisaient à y faire un tour. Juste le temps de refaire l’actualité du monde. Il était toujours aux petits soins de ses visiteurs jusqu’aux derniers détails culinaires. Habib était si résilient, qu’il ne déprimait point. Il prenait souvent de mes nouvelles, depuis l’entame de ma carrière internationale journalistique. De La Lettre du Continent en France au Journal LES AFRIQUES (Suisse et Maroc) en passant par Africa International à la rue Colisée- Paris, il était inside sur le « social living » pour emprunter l’usage anglophone. Toujours souriant, d’un avenant débordant, moulu dans une piété inouïe, Habib ne ratait jamais les heures de prière en bon hapular, élévé dans la cour d’une lignée sainte. Sa famille aussi bien dans le Fouta qu’à Diourbel, était très attachée aux principes et valeurs islamiques. Habib n’avait pas droit à la moindre erreur. Il nous le répétait souvent comme une maxime marronnière. Sa publication EN VEDETTE qu’il éditait après des semaines laborieuses de prospection commerciale était le « carburant » de sa vie. Il gardait espoir que les temps changeront un jour pour la presse sénégalaise dite « précaire ». Pur hasard, mais d’une portée prémonitoire, j’ose dire, Habib débarqua dans les locaux de Confidentiel Afrique sis à la Cité Keur Gorgui avant mes derniers déplacements au Kenya, en Éthiopie et en Mauritanie. Nous avions effectué les prières du Asr et du Maghreb un jour de vendredi de surcroit. Ce fut notre dernière rencontre, il ya deux mois. Coïncidence, vendredi dernier juste avant la prière du Jumma, je reçois le coup de fil de mon cher Habib SY qui me passa son épouse. Il me demanda et insista avec un brin d’humour : « Chérif, au delà du métier qui nous lie depuis 35 ans, tu resteras toujours mon imam. J’ai besoin de tes prieres ». Habib, tu es parti finalement ! Quelle perte ! Un homme pieux, digne et résilient s’en est allé, sans finir d’écrire les belles pages de l’aventure de sa publication EN VEDETTE, dont il rêvait tant. Tu es aussi une vedette pour nous qui t’avons connu et pratiqué dans les moments de joie et de peine. Je pense à notre ami et frère commun Feu Mouhamadou SOW du Journal LE CHOIX, et Mamadou Traoré du Soleil qui t’ont précédé au ciel. Je compatis avec cette douleur avec le Doyen Cheikh BA (ex-Soleil), Alioune Kébé, Fara Samb, Mohameth THIAM, Jamil Thiam, Oumar Faye, Elie Charles Moreau, Cheikh Oumar TALL du Journal LE JOUR, Fernández, Ibrahima MBODJ, Cheikh BA du journal Profil, Oumar Faty. A tes frères, Amadou Tidiane SY, Directeur de la grande école de Journalisme EJICOM, à Moustapha, Chamsdine et à ton beau- frère Oumar SEYE qui nous chérissait tant, quand nous étions des jeunes reporters, le vide que tu laisses sera éprouvant à supporter. Comme le célèbre adage arabe le dit: Un jour sur terre, un Jour sous terre. Mon cher Habib, l’élégant journaliste, Repose en Paix..
Ton Frère et Collègue,
Chérif Ismael AÏDARA, Directeur de Confidentiel Afrique